lundi 21 mai 2012

Les Ignorants

Sous-titré: Récit d'une initiation croisée.

L'auteur a vécu un an à côté d'un vigneron, ils se sont rencontrés les collègues les uns des autres. Je suis quelques pages de la fin. Je peux dire de cette BD comme l'auteur disait de Maus par Spiegelmann:

Il fait partie des bouquins qui rassurent: si on peut faire ça en Bande Dessinée, ça vaut le coup de s'y consacrer sérieusement.


Sur Moebius et son alter égo derrière Blueberry, je suis plutôt d'accord avec le vigneron. Mais ce n'est pas parce qu'un auteur surestime ou sous-estime un autre qu'on doive le sous-estimer: je lis Tolkien malgré son sous-estime du Monde de Narnia par C S Lewis, donc on lit Davodeau sans états d'âme malgré son surestime de Moebius.

C'est vrai que goûtant quelque chose en ignorant les codes de la branche on peut arriver à des conclusions surprenantes pour ceux qui les connaissent: le vigneron qui n'aime pas Moebius ou l'auteur de BD qui préfère un vin pas cher à un vin que les connaisseurs posent au sommet et paient de 20 € la bouteille. Ceci est un des points de sens moral de cette BD.

Mais sans oublier toutes les petites leçons qu'on a sur les deux métiers. Quand le vigneron met du silice sur les feuilles, 30 g. par hectare - on prend d'avantage on brûle la vigne. Ou quand le bédéiste se met trop proche d'un cep en décavaillonnage. La raison trop pertinente pourquoi je n'aimerais pas être vigneron: si on est maladroit on risque de beaucoup gâcher. Sur le papier ou la claviature d'un ordi on peut reprendre le coup, dans les vignes non.

Ou quand le vigneron découvre que le papier choisi par Davodeau est un peu comme le tonneau choisi par lui-même. Une neutralité active et bienveillante est recherchée dans les deux cas.

Et cette préférence dans le Jura pour un vin qui est vraiment bon pendant six mois - ça me rappelle les Heurigens de Vienne. Un ami de mes grand-parents et surtout sa femme ont été mes amis pendant l'enfance. Lui c'était un vigneron-bariste: là on sert le vin qu'on cultive un-même. Côté restau on peut y amener à manger ou demander sur place, mais on prend le vin qu'il y a (ou pour enfants: limonade, il y en a qui combinent les deux).

Mon très haut estime pour Richard Leroy, donc, et pour ses collègues au Jura. Ainsi que pour leur documentateur doué de plume, Étienne Davodeau. Et surtout un souhait de bonne lecture, car mes quelques lignes sont loin d'épuiser les 260 et quelques pages!

Hans-Georg Lundahl
BU-UPJV, Beavais
21 V 2012